« Le Noir marron » est l'histoire de Tarquin, un fier Bambara qui se retrouve esclave à l'île Bourbon, puis, malgré lui, le meneur d'une bande de marrons. Publiée à Paris en 1831, la nouvelle de Victor Charlier est surtout la plus ancienne fiction sur un esclave fugitif de cette colonie.
Elle fonde le roman du marronnage, le genre qui hante la littérature réunionnaise jusqu'à nos jours.
Du même auteur, « Le Retour du jeune Créole » met en scène L'Arti-mon, qui se mesure au fils de son maître pour les faveurs de Fanny, exploitée à l'île Maurice. « Une mulâtresse » est quant à elle centrée sur Cornélia, une mère-courage qui affronte des préjugés iniques jusqu'à se poser cette question folle : « De quelle couleur suis-je ? »
Dans ces trois récits tragiques, ainsi que dans « Les Blancs », un essai ethnographique qui se conclut par une excursion au piton de la Four-naise, l'auteur brosse un tableau froidement réaliste des Mascareignes et de leurs habitants. Il vilipende les mœurs coloniales dans ce qu'elles ont de plus raciste, mais aussi de plus classiste.
Mal connue, l'œuvre de Victor Charlier méritait d'être mise en lumière : c'est désormais chose faite avec ce recueil qui combine jalousies et révoltes, et que nous proposons commenté.
Physiologie des Nègres dans leur pays, voilà un titre de livre qui ne peut guère laisser insensible ! La faute à un mot raciste devenu inacceptable, mais aussi à cause de la fausse piste sur laquelle il lance le lecteur d'aujourd'hui. Car l'ouvrage n'est pas une étude scientifique sur la biologie humaine, et il ne s'intéresse pas tant au continent africain qu'à la seule île Bourbon, que l'on reconnaît entre ses lignes.
Il s'agit d'une analyse socio-anthropologique de la population servile, sur les habitations de cette colonie. Son objet : servir de pamphlet anti-abolitionniste alors que l'on débat déjà de la fin de l'esclavage, au début des années 1840.
D'importance majeure, sa redécouverte met en lumière une source méconnue de l'histoire de l'exploitation des personnes de couleur à La Réunion. Malgré la partialité des auteurs, leurs imprécisions, leurs erreurs et leur mauvaise foi, ils nous livrent un document riche en détails utiles sur les esclaves, qu'ils ont manifestement côtoyés, et qu'ils dépeignent parfois avec la sympathie navrée d'un humour paternaliste.
Intégralement reproduit avec toutes ses illustrations d'époque, le texte est accompagné de commentaires et d'analyses d'historiens et de spécialistes qui aident le grand public à mieux démonter la logique erronée de certains discours passés. Surtout : il dresse de Bourbon dans les années 1840 une description fascinante, qu'il faudra désormais avoir lue.